Mon expérience dans la société INL de 2006 à 2008

Février à juillet 2006 : Stage chez INL

Pour finir mes études à l'UTBM, je devais faire un stage de 6 mois. J'ai passé des entretiens dans 3 sociétés de sécurité informatique et 2 sociétés de jeux vidéos (toutes à Paris) et Nero (en Allemagne). Pour mon plus grand plaisir, l'ensemble de ces sociétés étaient prêtes à me prendre en stage.

En me basant sur mon ressenti à l'entretien, j'ai éliminé certaines sociétés. J'ai éliminé le secteur du jeu vidéo, car je n'étais pas sûr de me plaire dans ce milieu. J'ai fini par retenir INL et Nero.

Nero proposait un CDI et un meilleur salaire, mais j'ai choisi INL car ils publiaient des logiciels sous licence libre. Nero était connu pour être hostile au logiciel libre malgré une version Linux (propriétaire et payante) de leur produit phare (un logiciel de gravure de CD et de DVD). Je me suis alors installé à Paris dans un appartement en colocation avec un ami de mon école.

À INL, j'ai travaillé sur le parefeu NuFW, un parefeu capable d'associer une personne physique à une connexion réseau de manière sûre, mais nécessitant un agent sur le poste client. J'ai passé beaucoup de temps à documenter le code. J'ai ensuite travaillé sur un module Prelude (IDS). Pour m'amuser, j'ai adapté NuFW pour qu'il soit compatible IPv6.

INL avait trois activités. La principale était la vente de service autour des serveurs Linux (mail, web, parefeu, réseaux, etc.). La seconde consistait à fabriquer des parefeux maison basés sur Linux avec NuFW et NuFace (outil d'administration du parefeu). La dernière était un collègue en régie au conseil de l'Europe.

Septembre 2006 à février 2007 : développement C sur NuFW en télétravail

À la fin de mon stage, j'ai décidé de m'installer à Strasbourg avec ma petite amie. Mon chef m'a proposé de m'embaucher. Comme je lui ai dit que je voulais rentrer en Alsace, il m'a proposé un poste en télétravail. Je serai le seul employé en télétravail pendant plusieurs années. J'ai accepté car la société me plaisait beaucoup.

Je me suis alors installé dans un appartement à Strasbourg, mon CDI a débuté en septembre 2006. Vu mon statut particulier (télétravail), j'avais 3 mois de période d'essai, malgré mon stage. Pendant un mois j'ai squatté chez mes parents, ma soeur et mon collègue strasbourgeois car j'ai eu de grosses galère avec l'installation de ma ligne ADSL (Free). Pour l'anecdote, le numéro de téléphone donné par mon propriétaire avait été réassigné à quelqu'un d'autre entre temps, Free avait alors dégroupé une personne que je ne connaissais pas...

J'ai continué à développer le projet NuFW pendant six mois. J'ai développé quelques fonctionnalités et passé pas mal de temps à stabiliser le code. J'ai corrigé quelques crashs vicieux (ce qui offre une grande satisfaction quand on les a résolus) et de nombreuses fuites mémoires (c'est-à-dire que j'ai appris à utiliser Valgrind ;-)). Le parefeu était très stable : il fonctionnait en production sans problème pendant plusieurs mois avec seulement 6 Mo de mémoire.

2007-2008 : développement PHP sur NuFace

Petit à petit, je me suis intéressé au projet NuFace, un outil d'administration du jeu de règles du parefeu. Il était écrit en PHP4 et son code laissait à désirer. Ne supportant pas le code impur, j'ai passé de long mois à nettoyer le code pour passer à PHP5, utiliser les exceptions PHP, factoriser le code, écrire quelques tests, etc. Vu que le code avait largement changé, la version majeure est passée à 2.0 (une petite victoire pour moi).

Début 2007, EdenWall a remporté un appel d'offre EOLE à Dijon et y a placé deux collègues en régie. EOLE développe un module de contrôle des accès Internet (parefeu et proxy filtrant) et un serveur pédagogique (partage de fichier, courriel, etc.). Leur produit est d'ailleurs un succès car il est utilisé dans des centaines de collèges français. Avec le Conseil de l'Europe, ça faisait une deuxième rentré d'argent fiable. Par contre, le contrat avec le Conseil a été perdu au courant de l'été 2007.

Durant la période 2007-2008, deux collègues ont été licenciés. Je pense que c'était en partie dû à un travail insatisfaisant et en partie dû à un problème de personnes qui ne s'entendaient pas. Encore aujourd'hui, les raisons sont assez obscures pour moi et j'ai été assez marqué par ces licenciements.

Pendant cette période, j'ai eu des passages à vide car je me sentais seul dans mon bureau à Strasbourg, j'avais l'impression que mon travail ne servait à rien. Je n'ai pas fait une dépression, je n'avais juste plus envie de travailler. J'ai expérimenté quelque chose : je n'ai pas travaillé pendant un jour pour voir ce qui se passait. Il ne s'est rien passé, ça m'a beaucoup déçu. Plus tard, je n'ai pas travaillé pendant une semaine entière. Là ça s'est plus mal passé, j'ai été convoqué à un entretien avec la direction. On m'a reproché de ne faire que ce qui me plaisait et de ne pas écouter mon supérieur.

Plus tard, le PDG m'a accusé d'avoir écrit mes articles pour MISC durant mes heures de travail. Ça m'a beaucoup vexé car c'était faux. De manière générale, j'ai toujours été mal vu par la direction et mon chef d'équipe, car ils n'avaient pas de visibilité sur ce que je faisais. Peut être que de ne venir que trois jours par mois sur Paris était insuffisant.

Logiciel libre

De nouvelles versions de NuFW et de NuFace étaient régulièrement publiées. À la fin, j'ai même été autorisé à publier moi-même les nouvelles versions, sans avoir besoin de demander la permission à chaque fois.

Un miroir du dépôt du code source était public, les derniers commits étaient donc directement publiés.

Notre commercial se servait du fait qu'INL était très impliqué dans le logiciel libre pour vendre nos services.

Des collègues publiaient également des articles dans MISC et LinuxMag, parfois pour INL. Le summun a été un hors série LinuxMag entièrement dédié au parefeu Linux (Netfilter) co-écrit par plusieurs collègues et moi.

INL était présent au salon Solution Linux. Certains collègues et moi donnaient également des conférences à des évènements liés aux logiciels libres ou à la sécurité informatique, comme les RMLL, FOSDEM et CanSecWest.

Malheureusement, en six ans, il me semble qu'il n'y a pas eu plus d'une dizaine de contributions sur les projets NuFW et NuFace. Surtout des correctifs et fonctionnalités mineures. La plus grosse contribution a été un module d'authentification MySQL pour NuFW.

Je pense que la version libre de NuFW n'a jamais décollé car ce parefeu cible surtout le milieu de l'entreprise (PME voire grands comptes) et que les sociétés préféraient des solutions plus simples et dont l'éditeur était plus connu (ex: Checkpoint).

Conclusion

L'ambiance de travail et l'aspect logiciel libre ont permis de recruter d'excellents développeurs. INL était un paradis pour geeks libristes, je me sentais très bien intégré à l'équipe et il n'y avait pas de clivage entre la direction et les développeurs (on sortait régulièrement ensemble dans les bars).

On travaillait dur, mais on le faisait parce qu'on aimait notre boîte et ça ne nous posait aucun soucis. De toute façon, tous les développeurs étaient des passionnés.